



Message du 5 décembre 2017
Le 8 décembre, Solennité de l’Immaculé Conception de la Vierge Marie
Si Marie, la mère de Jésus, est née le 8 septembre, elle a été conçue neuf mois auparavant, c’est-à-dire le 8 décembre. Voilà pour le calendrier familial.
En fait, ce calendrier ne permet pas de saisir le sens profond de la solennité de l’Immaculée Conception de Marie. Voyons pourquoi.
Dès qu’il y a eu des disciples du Christ Ressuscité, la mère de Jésus a été vénérée. Cette vénération, cet amour pour Marie jaillit de la reconnaissance de sa mission à l’égard de Jésus : le Seigneur lui a demandé d’enfanter le Messie, le Fils de Dieu. Elle a répondu : oui. Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole (Luc 1,38).
Marie a nourri Jésus ; elle l’a éduqué, avec son mari Joseph ; elle lui a appris à prier, à s’inscrire dans la grande tradition juive ; elle l’a emmené en pèlerinage à Jérusalem. Comme toutes les mères, Marie a éduqué son fils en de multiples domaines de ce qui fait notre humanité, et aussi dans tout ce qui a trait à la foi, à la relation avec Dieu, à la relation avec le peuple de Dieu, le peuple de l’alliance.
L’Eglise voit en Marie la mère de Jésus. Comme Jésus est Fils de Dieu, Marie est reconnue comme mère de Dieu. La fête première, dans l’ordre théologique, est la maternité divine de Marie, que nous fêtons le premier janvier.
Avec le temps, l’Eglise a inscrit Marie dans le dessein de salut. C’est ainsi que vient la reconnaissance d’une sorte de « préparation » de Marie qui va enfanter le Messie, le Fils de Dieu. Irénée de Lyon, IIème siècle de notre ère, voit en Marie la nouvelle Eve. Dans le livre de la Genèse, il est écrit : L’homme appela sa femme « Eve » (c’est-à-dire la vivante), parce qu’elle fut la mère de tous les vivants (Genèse 3, 20).
Ceci mérite une explication. Dans la lettre aux Romains, l’apôtre Paul fait une comparaison entre le livre de la Genèse et le mystère pascal du Christ : En effet, si la mort a frappé la multitude par la faute d’un seul, combien plus la grâce de Dieu s’est-elle répandue en abondance sur la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ (Romains 5,15). Le mystère pascal du Christ atteint tous les êtres humains ; ils sont tous libérés du mal ; ils reçoivent tous la vie éternelle ; ils sont tous promis à la gloire dans le Royaume de Dieu. De même que tous sont blessés par le mal, victimes du mal – ce que la tradition de l’Eglise latine appelle le péché originel – de même, par le Christ, tous sont sauvés du mal.
Marie bénéficie de ce salut, dès le premier instant de son existence, dès sa conception. D’où l’expression : Immaculée Conception. L’Eglise reprend ainsi la salutation de l’archange Gabriel : Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi (Luc 1,28). Et elle voit en Marie l’accomplissement de l’hymne de la lettre de l’apôtre Paul aux Ephésiens : (Le Père) nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour (Ephésiens 1,4).
C’est donc pour bien manifester que, dès le début, Marie est préservée du péché originel, du fait d’être blessée par le mal, que le bienheureux Pie IX (pape de 1846 à 1878) a, en 1854, promulgué le dogme de l’Immaculée Conception de Marie. Le Pape reprenait ainsi une formule du XVème siècle : Dieu a préparé à son Fils une demeure digne de lui par la conception immaculée de la Vierge. La liturgie latine reprend cette expression dans la prière d’ouverture de la célébration eucharistique du 8 décembre.
La Préface du 8 décembre est un modèle de prière qui nous fait entrer dans la foi : Car tu (Père très saint) as préservé la Vierge Marie de toutes les séquelles du premier péché, et tu l’as comblée de grâce pour préparer à ton Fils une mère vraiment digne de lui ; en elle, tu préfigurais l’Eglise, la fiancée sans ride, sans tache, resplendissante de beauté.
C’est un des grands enseignements du concile Vatican II (1962-1965) que d’avoir intégré Marie dans la Constitution dogmatique sur l’Eglise (Lumen Gentium). Marie est une personne individuelle ; Marie est aussi figure de l’Eglise. Ce qui est dit sur Marie peut aussi être dit sur l’Eglise. C’est dans ce sens que la Préface parle de Marie comme celle qui préfigure l’Eglise, la fiancée sans ride, sans tache, resplendissante de beauté, Eglise qui devient la mère de tous les humains qui, par le baptême, la confirmation et l’eucharistie, sont devenus enfants de Dieu, fils adoptifs alors que le Christ, le Fils de Dieu, est le Fils unique. L’hymne de la lettre aux Ephésiens continue : (le Père) nous a prédestinés à être pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ. Ainsi l’a voulu sa bonté, à la louange de gloire de sa grâce, la grâce qu’il donne dans le Fils bien-aimé (Ephésiens 1,5-6).
La solennité de l’Immaculée Conception de Marie est célébrée au début du temps de l’Avent. Nous entrons dans le dessein de Dieu, l’accomplissement d’une promesse. Marie, à qui le Seigneur va demander d’enfanter Jésus, sous l’action de l’Esprit Saint, nous invite à dire oui au Seigneur, qui nous parle au cœur. Marie nous rappelle que, dans le Christ, nous sommes prédestinés à être pour lui des fils adoptifs.
Oui, déjà maintenant, nous entendons dire que nous sommes enfants de Dieu : Voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes (1ère lettre de Jean 3,1).
+ Guy Harpigny,
Evêque de Tournai
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