Guy Agneessens, 60 ans de prêtrise
De Kain, Soignies, Tournai, Jurbise, Esplechin et ailleurs, les amis seront nombreux dimanche, autour de Guy Agneessens
Ils seront nombreux… «s’ils peuvent venir» note Guy Agneessens. «Parce que l’âge est là. J’aurai 85 ans en décembre. Et des amis, j’en ai déjà perdu pas mal. On avait été vingt-deux à être ordonnés en même temps. On est encore trois en vie… Moi-même, quand je dois me déplacer, ça devient compliqué. C’est pour ça que je fête mes 60 ans de prêtrise quelques mois à l’avance, à la fin de l’été, quand il fait encore beau. C’est toujours ça de gagné. Tu imagines, en février, avec un pied de neige ou du verglas…» Chez Guy Agneessens, l’humour n’est jamais loin.
À Kain, le fils d’Alphonse
Le futur prêtre naît à Kain, à l’école communale le 2 décembre 1931, après une sœur de deux ans son aînée. Il perd sa mère alors qu’il n’a que dix ans. Son père, Alphonse, est «l’instituteur». Celui qui, vers la fin de sa vie, publiera «Vivre à Kain», livre-référence du village.
Après des humanités (en partie durant la guerre) au collège Notre-Dame de la Tombe, le jeune Guy a la vocation. «Je fais 2 ans de philosophie à Bonne Espérance, 4 de théologie à Tournai entrecoupés d’un service militaire de 18 mois. Et je suis ordonné à Saint-Brice en février 1957.»
À Soignies, pion, prof, boss…
Reste à caser le tout nouvel abbé. On lui a vaguement demandé son avis… «Comme j’en avais soupé de l’école avec un père instit, j’ai répondu «tout sauf l’enseignement»… Je vois encore Mgr Himmer me dire: «je sais bien… mais tu vois, tu fais partie de ceux que je peux mettre n’importe où et…» J’avais compris.Je me retrouve pion à Saint-Vincent, à Soignies.
Je ne sais pas si j’en étais fâché, mais au premier repas des externes que je dois surveiller, j’entends les gamins muser: mmmh, mmmh… La colère me prend. Je fracasse ma chaise et je les fous tous dehors, sous la pluie. Je n’ai plus jamais dû élever la voix auprès d’eux!»
Quelques mois après ce haut fait, il devient titulaire de «syntaxe» (la 4e ). Pour 10 ans.
«Puis, un jour que je suis de passage à Tournai, l’évêque m’appelle, l’air de rien. Il était dans le hall, assis sur un appui de fenêtre, juste à côté d’un pot de géraniums. Et sans la moindre solennité, il m’annonce: «Guy, tu deviens principal…» J’ai fait ça 12 ans.
Je lance alors, – sans prétention, à Soignies, on a été des pionniers-, les humanités sportives. Ça a été un vrai succès, parce que dans notre esprit, l’éducation sportive permettait à des jeunes de traverser l’adolescence sans trop de fracas. Ils obtenaient des résultats dans les autres branches qu’ils n’auraient pas eus sans la pratique physique… C’était bien le but!
Les années passent, et tu sais quoi, au bout d’un moment, ça fait 12 ans que je suis le patron de Saint-Vincent. Je deviens tout-puissant. «Le pouvoir gâte l’homme» je le sais, mais là je le vis… Je veux changer d’air. Je demande à Mgr Huard de me faire curé quelque part.»
Curé-doyen à Saint-Paul, le rêve
Son souhait est exaucé au-delà de ce qu’il imaginait, même s’il est un peu surpris au départ. L’évêque lui confie «Saint-Paul», à Tournai. Guy Agneessens, vivant depuis une vingtaine d’années à Soignies, n’avait pas vu grandir la jeune paroisse tournaisienne. «Saint-Paul, je savais que ça existait, mais pas plus. C’est le vicaire général Debevere qui m’a montré le chemin de l’église, c’est te dire!
Là j’ai été heureux. Vraiment heureux. C’était une paroisse pleine de dynamisme, de ressources. Des plus jeunes aux plus âgés. Tout ce qu’on entreprenait se faisait dans l’enthousiasme. Il y avait de l’initiative, on a fait beaucoup de bonnes choses. Saint-Paul, ça doit être le rêve de tout curé.»
Il cite des noms de famille en pagaille. Sur les pêle-mêle de sa pièce de vie à Esplechin, beaucoup de visages connus à Tournai. Rapidement aussi, il devient doyen de la ville.
«Un beau jour, j’ai eu 65 ans. J’étais convaincu qu’une paroisse comme Saint-Paul devait bénéficier d’un curé dans la force de l’âge. C’est vrai que comme doyen je voulais aussi un peu montrer l’exemple. Je savais que la relève n’était plus autant assurée que par le passé, mais laisser les vieux curés s’encroûter dans leur paroisse, ou les user jusqu’à la corde…, ça n’était pas une solution.»
Le chanoine et le baptiste
Jean Huard l’envoie alors à Jurbise (note: juste à côté de Soignies) comme desservant. Il y reste deux ans, le temps de prendre ses marques… avant de revenir à Tournai comme chanoine au chapitre de la cathédrale. «Je me suis alors installé un temps à la rue du Casino, puis j’ai appris que la cure d’Esplechin allait être libre. C’était une belle bâtisse, avec un grand jardin, au pied de l’église…
Je ne connaissais personne, mais je me suis plu très vite. Je donne un coup de main au curé de Tournai-Ouest, Jean-Claude Carlier, qui se trouve être mon petit-cousin. Je célèbre la messe à Esplechin, Froidmont, Lamain, Marquain. En termes d’enterrements, je fais ce qu’il me demande, mais il n’abuse pas. Il sait que j’ai bientôt 85 ans, hein…
Sinon, je fais encore pas mal de baptêmes, mais ça, c’est parce que comme j’ai du temps, je peux les faire un par un, alors que les curés en activité, eux, ils sont surchargés et doivent les grouper.»
Pour la suite, tout est prévu. «J’ai déjà mon lopin de terre, en face» (la maison donne sur le cimetière…) Cela dit le chanoine émérite n’est pas pressé de rejoindre le très-Haut.
Il reçoit ses amis ici-bas avec plaisir. Il adore converser en patois et ne dédaigne pas un petit juron de satisfaction de temps à autre. Pour compléter ce bien-vivre, il a adopté un régime qui n’est pas sans rappeler celui qu’avait jadis vanté Winston Churchill… «Ne mets pas ça dans le journal, sot!»
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Créé parDiocèse de Tournai