Une plongée au cœur des évangiles
La session de formation permanente 2019 a choisi de se pencher sur les évangiles de Marc, Luc et Matthieu, les évangiles synoptiques. Deux jours pour mieux comprendre le contexte de leur rédaction, découvrir un genre littéraire nouveau et porter trois regards sur le Christ.
Un temps de prière pour les participants |
La session de formation permanente du diocèse de Tournai, c'est le rendez-vous annuel auquel sont invités prêtres, diacres, animateurs en pastorale, membres d'EAP et inspecteurs du cours de religion pour approfondir, réfléchir, se former ensemble. Comme l'an dernier, la session s'est tenue dans le complexe cinématographique montois, ces 11 et 12 mars. Plus de 200 participants ont répondu à l'appel et ont ainsi envahi une salle d'Imagix pour écouter plusieurs orateurs de haut vol.
L'Evangile. « Un territoire familier, 'restreint' mais pluriel », insiste Jean-Yves Nollet (animateur en pastorale au service de la formation) en guise de préambule. Un Evangile qui se dit en quatre évangiles, tour à tour « selon » Marc, Luc, Matthieu et Jean. Quatre récits, quatre regards différents, une symphonie - avec parfois quelques dissonances - pour raconter la vie, la mort et la résurrection de Jésus. Mais seuls les trois premiers sont appelés « synoptiques », parce que grâce à leur construction très similaire (avec par exemple 330 versets communs aux trois et un schéma narratif parallèle), il est très aisé de les comparer « d'un seul coup d'œil ».
Mais que s'est-il passé pendant 40 ans ?
Les évangiles constituent la mémoire vivante du Christ. Tout part de Jésus, et pourtant Jésus n'a rien écrit. Entre sa mort et ces récits qui portent la Bonne nouvelle, une quarantaine d'années se sont écoulées. Que s'est-il donc passé pendant toutes ces années ? C'est notamment à cette question que le vicaire général Olivier Fröhlich s'est attaché.
Au départ, la mémoire se transmet oralement, car à l'époque la parole jouit d'un plus grand prestige que l'écrit, et peu de personnes sont capables de lire et écrire. Ensuite, des souvenirs sont vraisemblablement fixés par écrit (pour contrer la disparition progressive des témoins oculaires), mais il ne reste rien aujourd'hui de ces fragments et il s'agit donc d'hypothèses. Enfin vient le temps d'une réelle volonté de rédaction, et les diverses traditions orales (dont la prolifération devient difficile à gérer) sont structurées en un récit.
L'une des écoles de pensée pour l'analyse de cette période - la psychologie cognitive - décortique le fonctionnement de la mémoire humaine : il ne s'agit pas d'un mécanisme d'enregistrement fidèle des événements mais d'une interprétation du passé en fonction de sa valeur pour le présent, certains souvenirs sont « construits ». La mémoire des faits et la mémoire des concepts ne coïncident ainsi pas toujours...
- Lire ici l'intégralité de l'intervention de l'abbé Olivier Fröhlich
Un genre littéraire étonnant
Camille Focant, exégète qui a entre autres enseigné à la Faculté de théologie de l'UCL (dont il fut doyen) et a été vice-recteur des sciences humaines de l'UCL, auteur de nombreux ouvrages, est l'un des grands spécialistes de l'évangéliste Marc. « 40 ans après la mort de Jésus paraît un livre étonnant, extravagant. Son auteur serait un certain Marc. Un siècle plus tard, la mention 'selon Marc' sera ainsi ajoutée à l'intitulé du récit. »
En créant ce genre littéraire innovant qu'est l'évangile, Marc est le premier à faire passer la Bonne nouvelle dans un récit. Sans doute voulait-il s'adresser à un large public qu'il s'agit d'étonner et d'ouvrir à une foi nouvelle. Un public qu'il invite à percer le mystère de Jésus, toujours à découvrir, source sans cesse renouvelée de questionnement. « Le récit de Marc est une subtile invitation à entrer dans un nouveau monde, le règne de Dieu, à emprunter un chemin à la suite du Crucifié. »
L'exégète louvaniste s'attardera plus tard sur le rôle du Temple, terme que l'évangéliste Marc n'utilise que dans un contexte polémique, lieu pour Jésus de confrontation (face aux marchands) et d'enseignement, et dont il prévoit la destruction. Marc donne au contraire un rôle central à la « maison », qui supplantera le Temple dans sa mission de maison de prière pour toutes les nations.
L'œuvre en deux tomes de Luc
Pour clôturer la première journée de formation, l'abbé André Minet, doyen de la région pastorale de Mons-Borinage, a offert à l'assemblée un tour d'horizon de l'évangile selon Luc. « L'évangile de Luc est original à plus d'un titre », souligne l'orateur régional de l'étape. « Luc a notamment prolongé son récit par les Actes des apôtres, qui évoquent l'Eglise à ses débuts. C'est aussi l'évangile le plus long. Et Luc est le seul à parler à la première personne. » Avec cette œuvre en deux tomes, l'évangéliste souhaite montrer l'Eglise en relation avec Jésus, le temps de l'Eglise s'inscrivant dans la continuité du temps de l'accomplissement.
« Jésus tarde à revenir. À l'origine, on pensait que le délai du retour serait bref, mais il se fait attendre et il faut tenir dans cette attente. » Alors comme pour tromper cette attente, Luc n'hésite pas à de nombreuses reprises à utiliser le terme « aujourd'hui », ouvrant ainsi la porte à l'actualisation de l'action du Christ dans notre histoire...
Deuxième journée de formation :
La prière chez Luc, l’accomplissement de la Loi chez Matthieu…
La session 2019 en photos
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Créé parDiocese de Tournai