La maison Saint-Paul à Mons: un refuge au cœur de la ville
La maison Saint-Paul a fêté ses 40 ans en 2019. Elle accueille et héberge des hommes que la vie a laissés sur le bord du chemin et qui font face à de grandes difficultés économiques et sociales. Un lieu plein de bienveillance pour se poser une nuit ou quelques mois. Et pour reprendre pied...
C'est sous l'impulsion de l'abbé Michel Diricq et d'une poignée de jeunes Montois que la maison Saint-Paul a vu le jour : « L'élément fondamental a vraiment été Michel Diricq », raconte Patrick Marlière, directeur de la structure d'accueil depuis 1998. « Il avait cette idée de faire quelque chose ici, à la rue Saint-Paul, mais il ne savait pas trop quoi. Il a entraîné derrière lui des jeunes qui étaient allés en retraite à Taizé et qui voulaient concrétiser ce qu'ils avaient vécu là-bas, au niveau de leur foi. L'idée d'accueillir des sans-abri est venue après, je pense que des SDF se sont présentés, et cela a servi de déclencheur. »
Aujourd'hui, la maison compte deux implantations à Mons et une à Flénu, non loin de là, pour une capacité d'accueil maximale de 51 personnes. « Nous avons pour l'instant un gros chantier dans une rue voisine et nous avons l'intention, le plus rapidement possible, de ramener nos trois maisons dans deux maisons, une nouvelle configuration qui permettra des synergies et une surveillance 24h/24 dans l'ensemble des bâtiments », précise le directeur.

Une équipe professionnelle et des bénévoles engagés
Le staff de la maison d'accueil montoise compte actuellement 23 travailleurs, essentiellement des éducateurs et des assistants sociaux qui œuvrent aux côtés de la direction. Dans le bâtiment « historique » de l'institution, à la rue Saint-Paul, équipe de jour et équipe de nuit se relaient constamment. Ces emplois sont subventionnés par la Région wallonne. Mais les résidents participent également à assurer le fonctionnement de la maison par une petite contribution : « C'est une rentrée moins importante financièrement mais très importante symboliquement », assure M. Marlière. « Les résidents paient une pension journalière qui avoisine les 15 €. » Quelques dons viennent compléter les ressources de la maison Saint-Paul.
Outre les salariés qui font tourner la structure au jour le jour, plusieurs bénévoles apportent leur énergie et leur enthousiasme à la maison, au service des résidents ou pour l'organisation des divers événements qui chaque année remplissent l'agenda. Depuis environ 15 ans, Etienne Moureau vient à la rue Saint-Paul : « Quand j'ai été à la retraite, je me suis dit que je n'allais pas rester inactif. J'avais entendu parler de la maison Saint-Paul mais je ne la connaissais pas. Je suis venu sonner ici. Ils ont commencé à me donner des factures à analyser, des contrats d'assurance, des contrats d'électricité... Et puis j'ai rendu un certain nombre de services, comme des déménagements. »
Lucie Mahieu, coordinatrice sociale, et Patrick Marlière, directeur de la maison Saint-Paul |
Dettes de vie et ruptures familiales
Finalement, qui sont les hommes qui poussent les portes de Saint-Paul ? « Les hommes qui viennent chez nous ont comme points communs d'être des hommes et d'être majeurs », explique Lucie Mahieu, coordinatrice sociale de la maison. « En-dehors de cela, on sait difficilement dresser un profil-type. L'an dernier, 12% de nos hébergés avaient moins de 21 ans et moins de 4% avaient plus de 60 ans. Tous sont sans abri depuis un temps très variable ; certains ont dormi dans leur voiture plusieurs semaines, certains sont hébergés chez des connaissances plusieurs mois, ou en prison ou dans des hôpitaux, et pour d'autres le cataclysme est imminent, ils ont reçu un avis d'expulsion,... »
Chez chacun d'entre eux, un élément catalyseur a précipité la situation, les laissant sans toit d'un jour à l'autre. « Il peut s'agir d'une rupture conjugale, d'une rupture familiale, d'une sortie d'une autre institution. Mais autour de cet événement qui les précipite dehors, il y a tout un faisceau de facteurs de fragilisation qui sont là depuis des années, voire depuis toujours », détaille Lucie Mahieu. « Il y a pour tous un revenu très faible, presque toujours un revenu de remplacement, et presque aucun n'a une petite économie qui lui permettrait de rebondir. Près d'un résident sur deux arrive sans revenus et 80% sont endettés. »
De petites dettes, des « dettes de vie » : des factures énergétiques qui n'ont pas pu être réglées à temps, deux ou trois factures d'hospitalisation, des abonnements successifs contractés chez des opérateurs téléphoniques... « Pour la très grosse majorité, ce sont des tas de petites dettes. On est dans des situations tellement sur le fil en permanence que le moindre incident fait basculer. Nous-mêmes si nous étions comme cela toujours sur le fil financièrement, on ne saurait pas rebondir aux petits événements qui se produisent. »
Pour ne pas sombrer
La première aide apportée par la maison Saint-Paul à ces hommes à la dérive est une aide humanitaire : « Les gens vont trouver ici le gîte, le couvert, même s'ils n'ont pas de revenus, on avance tout ça. Les médicaments, les visites chez le médecin,... Et puis ils retrouvent la sécurité et le confort absolument nécessaires pour reprendre pied dans sa vie. C'est important pour ces gens qui ont été dans la rue, dans des squats ou des abris de nuit. C'est souvent l'épuisement de l'insécurité qui les contraint à accepter la maison d'accueil. »
Ensuite, l'aide sociale proposée par la maison Saint-Paul va permettre à beaucoup d'entre eux de rétablir leur situation, entreprendre des démarches pour apurer les dettes et retrouver un logement. Beaucoup demandent aussi à continuer à être suivis après avoir quitté la maison. Ce service « post hébergement », Olivier en a bénéficié et il s'est ainsi senti aidé, soutenu : « Je suis resté 9 mois ici. Suite à une séparation, j'ai été hébergé par des amis, puis à un certain moment ils m'ont dit que je devais essayer de trouver quelque chose. Ici on m'a vraiment aidé à me remettre sur pied. J'ai fait une formation pour avoir mon diplôme en boulangerie-pâtisserie. Au bout des 9 mois une place s'est libérée dans un logement et j'ai été suivi par le service extérieur. Le vendredi on se réunit pour souper ensemble, avec ceux qui veulent, c'est comme une petite famille. »
Aujourd'hui, Olivier se sent beaucoup mieux et plus serein. Bien qu'ayant quitté la maison d'accueil, il s'implique encore dans la chorale Saint-Paul, dans la marche Adeps ou le marché de Noël organisés chaque année. « Quand je me suis retrouvé quasiment à la rue, je me suis un peu laissé aller, je me voyais partir... » La maison Saint-Paul et son équipe se sont alors trouvées sur son chemin, pour l'aider à reconstruire sa vie.
Agnès MICHEL
En savoir plus
- En 2016, un très beau documentaire impliquant plusieurs résidents a été tourné à la maison Saint-Paul. Vous pouvez regarder «La brèche» sur YouTube.
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- Contact : Maison Saint Paul (maison d'accueil pour hommes), rue Saint-Paul 17 - 7000 Mons - secretariat@maison-saint-paul.be - 065 34 80 94 ; accueil 24h/24 sur le site principal
- Pour écouter ces interviews dans leur intégralité, découvrez l'émission « Près de chez vous en Hainaut », qui a été diffusée sur 1RCF :
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Créé parDiocese de Tournai
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