Saint Antoine l’ermite, un trésor de la statuaire gothique hennuyer presque de retour à la maison

Saint Antoine l’ermite, un trésor de la statuaire gothique hennuyer presque de retour à la maison

Après deux années passées en traitement de conservation-restauration auprès de l’atelier de restauration de sculptures de l’IRPA, la statue en pierre d’Avesnes datée des environs de 1400 est de retour à Havré, mais toujours pas dans sa chapelle Sainte-Antoine en Barbefosse. Retour sur une épopée ouvrant un beau dossier de sauvetage du patrimoine.

Fleuron de l’art gothique dans la région montoise, la chapelle Saint-Antoine en Barbefosse est pourtant en grand mal de restauration et actuellement fermée au public pour raison de sécurité. L’édifice est classé dans sa totalité comme monument et les abords comme site depuis le 25 juillet 1991. La toiture défectueuse a laissé passer des infiltrations d’eau et fait pourrir lentement la charpente et le faux-plafond placé en guise de protection de fortune. À l’intérieur de la chapelle, les murs s’effritent et les vitraux sont en partie cassés, laissant entrer les intempéries, insectes, oiseaux, … . C’est dans ce contexte alarmant que le service Art, Culture et Foi (ACF) de l’Evêché de Tournai et le service d’Aide à la Gestion de Paroisses (SAGEP) ont été interpellés par la fabrique d’église Saint-Martin, propriétaire de la chapelle, par le biais de son président en octobre 2017, pour les aider à interpeller les pouvoirs subsidiant quant à l’état de cet édifice. Une visite sur place des deux services a rapidement été suivie par une réunion avec la ville de Mons et le récolement de l’inventaire du patrimoine mobilier encore présent dans la chapelle.

La statue de saint Antoine est classée

Muni de l’inventaire de l’IRPA daté des années 70, une grosse matinée de travail a permis de pointer les œuvres manquantes et celles encore en place, ainsi que leur état de conservation. En date du 6 mai 2013, la Ministre de la Culture a signé un Arrêté ministériel de la Communauté française classant la statue saint Antoine avec la qualification, de trésor. Seule pièce classée trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles présente dans la chapelle, le saint Antoine a dès lors fait l’objet d’un dossier lancé auprès de la fédération pour un traitement de conservation-restauration.

Un premier dossier de demande de subsides auprès d’une fondation privée n’ayant pas abouti en 2018, le dossier est resté en suspens jusque juillet 2019. Une heureuse issue a pu aboutir grâce à la proactivité de la fédération qui est revenue vers le service ACF pour prévenir d’une possibilité de subsides non écoulés pour l’année 2019. Il restait alors 4 mois pour faire signer l’octroi de subsides en faveur de la restauration de la statue et moins de 2 mois pour établir le dossier et le faire passer à temps à la commission. Une réunion entre la fabrique et les membres de l’asbl Saint-Antoine Havré-Mons en Barbefosse a dès lors eu lieu pour établir un plan d’action à court terme.

Le 18 décembre 2019, le Conseil d’Administration et les membres de l’asbl Chapelle Saint-Antoine d’Havré-Mons sont massivement renouvelés par une nouvelle équipe pluridisciplinaire, sous la présidence de Marc Geerinck (professeur universitaire émérite – UCLouvain FUCaM Mons). Outre un lien avec la paroisse et la fabrique d’église ainsi qu’avec les riverains, afin de fluidifier les échanges et poursuivre son ancrage, cette équipe s’équilibre autour de compétences financières, culturelles et touristiques, historiques, juridiques et en ingénierie et patrimoine. De nouveaux membres sont venus enrichir l’asbl Saint-Antoine Havré-Mons et se sont entourés de tout un réseau de spécialistes pour établir de manière scientifique et professionnelle un relevé précis de l’état sanitaire de la chapelle. Muni de ce précieux document, les démarches ont pu commencer. L’asbl a notamment fait plusieurs opérations de nettoyage des abords, la végétation entourant « la fosse » de la chapelle devenant vite envahissante ; tout comme de l’intérieur. Toile d’araignée ou encore fientes d’oiseaux n’ont pas été en reste.

Une plaquette sur la chapelle

L’asbl finalise la publication d’une plaquette présentant l’édifice tant au niveau historique, patrimonial que sanitaire. Elle envisage le travail en plusieurs phases : études préalables et travaux préparatoires (état sanitaire, études préalables et entretien), restauration des toitures, restauration du gros-œuvre, restauration intérieure, affectation et valorisation et enfin aménagement du site et des abords.

Et l’asbl de conclure sa plaquette par ses lignes : « La chapelle se trouve dans un état de conservation particulièrement préoccupant. Malgré des mesures conservatoires menées fin 2020 qui ont souligné la fragilité de l’édifice, des travaux de restauration sont nécessaires afin d’enrayer les dégradations exponentielles observées tant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Dans l’état actuel des choses, le retour de la statue de saint Antoine après sa restauration par l’IRPA est inenvisageable. Afin d’éviter que la localité d’Havré ne perde une partie de son Patrimoine – et Mons en général, il devient urgent de trouver une solution acceptable pour sauvegarder cet ensemble remarquable. Une restauration globale de l’édifice et de son mobilier est requise afin de lui redonner son lustre d’antan, sa beauté originelle : un véritable écrin pour accueillir la Statue de saint Antoine, Trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles ».

Extraits de la plaquette de présentation rédigée par l’asbl Saint-Antoine Havré-Mons

La chapelle et son histoire :

Érigée entre 1389 et 1409 par le Seigneur d’Havré, Gérard d’Enghien, après avoir obtenu l’autorisation du Pape Clément VII, la chapelle fut dédiée à saint Antoine le Grand (ou l’Ermite), abbé et ermite égyptien du IIIe siècle. Le culte de Saint-Antoine aurait été importé dans la région par des chevaliers hennuyers revenus d’une expédition victorieuse dans l’île de Rhodes où le saint était vénéré. Les guérisons miraculeuses attribuées au saint, attirèrent un grand nombre de pèlerins à l’ermitage de Barbefosse, et principalement au cours de l’épidémie du « mal des ardents» de 1382.  Dans un premier temps, l’ordre des chevaliers de Saint-Antoine-en-Barbefosse, fondé en 1382, ne fut pas reconnu par l’ordre hospitalier de Saint-Antoine en Viennois, créé en 1095. Un accord fut signé entre eux en 1415, date à laquelle fut créé un prieuré. Dans la deuxième moitié du XVIe s., avec la décadence des Antonins, le prieuré passa successivement entre les mains des Bénédictins puis, celles des Jésuites, jusqu’en 1773. Les biens furent ensuite vendus et se dégradèrent progressivement. Entre 1773 et 1822, la chapelle gothique subit une amputation de la nef, ne conservant que le chœur avec un chevet à trois plans. Il s’agit de la seule partie d’origine encore visible actuellement.

Au niveau sanitaire :

D’importantes lacunes en toiture, présentes depuis de nombreuses années, laissaient pénétrer l’eau, atteignant ainsi une partie de la charpente et provoquant des chutes de matériaux. Un faux-plafond a alors dû être placé de manière à retenir les chutes de matériaux. Pour des raisons de sécurité, la fabrique d’église a dû se résoudre à fermer le bâtiment au public. De plus, certaines zones des maçonneries, mal rejointoyées, laissent pénétrer l’humidité et la surabondance de végétation autour de la chapelle accentue la présence d’humidité au sein du monument, entrave le séchage et la ventilation des maçonneries. Afin de limiter les dégâts, la fabrique d’église a fait poser, en 2005, des pièces de zinc en toiture afin de combler les lacunes.

Une seconde campagne de mesures conservatoires a eu lieu en décembre 2020, grâce à un subside exceptionnel de la Ville de Mons. Il s’agit de travaux de mise hors eau de la chapelle, notamment suite aux dégâts provoqués par les tempêtes de février 2020 (fixation d’arêtiers arrachés, remplacement d’ardoises en zinc, remplacement de corniches). Ces travaux ont mis en évidence le caractère très précaire de la couverture en cernant de manière plus précise les dégradations et leur ampleur. Ils ont enfin permis d’identifier des données utiles pour le projet de restauration (anciennes ardoises récupérées, etc.).

Bien que les lacunes en toiture aient été comblées, les problèmes d’humidité restent très importants et la cause principale de sa détérioration. Différents types de dégradations dues à l’humidité permanente ont été constatés tant à l’extérieur qu’à l’intérieur : gonflements et éclats de maçonneries, joints évidés, mousses, poutres vermoulues ou couvertes de champignons, voligeage pourri et disparu localement, efflorescences sur les revêtements muraux et sur la voûte…

Outre le fait que la toiture n’assure plus une étanchéité complète, une grande partie de la problématique est également due à la mauvaise évacuation des eaux de pluie. D’une part, les eaux qui ruissellent du talus vers la fosse dans laquelle est enclavée la chapelle ne peuvent s’évacuer et, d’autre part, les descentes d’eau, du chevet notamment, s’écoulent directement au pied du bâtiment où des traces d’humidité ascensionnelles de plus en plus préoccupantes se marquent sur les murs.

D’importantes fissures sont également présentes sur la façade avant ainsi qu’un tassement en partie centrale. La chapelle étant le vestige du chœur d’un édifice de plus grande importance, la démolition de la nef a probablement engendré des désordres au niveau des reports de charges provoquant ces fissurations.

Restés informés !

A.S.B.L. Chapelle Saint-Antoine d’Havré-Mons, en abrégé A.S.B.L.  C.SAH-M

Rue de France, 417034 Mons (Obourg)

barbefosse@gmail.com

FB : @barbefosse

Personne de contact :

Prof. M. Marc Geerinck, président

marcgeerinck@hotmail.com

Fabrique d’Église – Paroisse Saint-Martin d’Havré

Personne de contact :

Eric Bailly, président

eric.bailly@yahoo.com

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