Les Cendres, symbole de deuil et de renouveau

Les Cendres, symbole de deuil et de renouveau

Dans la liturgie, la période de Carême s’ouvre avec la célébration du Mercredi des Cendres. À cette occasion, le prêtre marque ses fidèles avec des cendres bénies. Ce rite a cependant bien évolué au fil des époques, sans pour autant perdre de son sens.

L’usage des cendres dans un rite n’est pas propre au Christianisme. Dans l’Ancien Testament, il était déjà question de ce symbole fort : se couvrir de cendres était une marque de tristesse et de désolation. C’était aussi, selon les situations, un symbole de repentir voire de conversion. Ainsi, dans le livre de Jonas, lorsque les habitants de Ninive décident de changer leurs habitudes, les cendres en sont un symbole : Ils proclamèrent un jeûne et se revêtirent de sacs, des grands jusqu’aux petits. Le roi se leva de son trône, il fit glisser sa robe royale, se couvrit d’un sac, s’assit sur de la cendre…  (Jonas 3, 5-6). Dans la tradition juive, se couvrir de cendres fait partie de la démarche de conversion. Il en est de même dans le christianisme, où elles sont une marque nous rappelant que nous sommes pêcheurs et appelés à nous convertir.

Les cendres sont aussi une marque de la fragilité humaine, de ce que nous sommes au regard de l’Univers et de Dieu. C’est un symbole d’humilité et un rappel de notre condition humaine et de notre passage éphémère dans ce monde.

Les cendres ont aussi un aspect positif. Ainsi, lorsque Judith se prépare à affronter le Babylonien Holopherne, elle se jeta face contre terre, répandit de la cendre sur sa tête et ne garda que le sac dont elle était revêtue (Jdt 4, 11). C’est un geste de pénitence mais aussi de confiance à Dieu.

De la pénitence à la conversion

Dans les premiers temps du Christianisme, les cendres étaient un symbole de pénitence. Il était ainsi d’usage dès la fin de l’Antiquité de couvrir de cendres la tête des personnes ayant confessé des fautes graves (apostasie, hérésie, meurtre, adultère). Cet acte faisait partie du rite de l’excommunication temporaire ou de l’exclusion des pécheurs de la communauté et n’était pas lié directement au début du Carême.

Quelques siècles plus tard, l’Église décide de consacrer 40 jours à la préparation spirituelle à la fête de Pâques. Comme les dimanches, jours de fête, ne peuvent être comptés dans ce temps de préparation, le début de ce cheminement est fixé le mercredi qui précède le premier dimanche.

À cette époque est apparue la « pénitence publique » vécue lors de ce premier jour de Carême. Les pénitents, couverts de cendres après avoir avoué leurs fautes en confession privée, étaient exclus de la communauté jusqu’à leur réintégration lors du Jeudi Saint, soit durant quarante jours (d’où l’origine du mot « quarantaine »).

Au milieu du Moyen-âge, vers le Xe siècle, les pénitences publiques sont une tradition vers le déclin. L’usage reste cependant de couvrir de cendres la tête des fidèles adultes pour marquer le début de leur démarche de conversion. Les croyants sont ainsi invités à se confesser et à suivre un chemin personnel de repentance.

Avec le concile Vatican II, le rite a évolué : il s’agit désormais moins de se repentir de ses péchés et davantage de suivre un chemin de conversion, de prière et de retour à Dieu. Le prêtre peut d’ailleurs prononcer ces paroles en marquant le fidèle : « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile » (Mc 1,15).

Un rite plein de sens

L’imposition des cendres est un symbole fort. C’est une invitation à l’espérance en la miséricorde de Dieu. Toute la communauté chrétienne est aussi appelée à se souvenir de l’Alliance qui l’unit à Dieu, notamment en se mettant à l’écoute de la Parole.

Les lectures du Mercredi des Cendres ne sont pas choisies au hasard et participent au rite liturgique. Avec la première lecture (Joël 2, 12-18), la communauté est invitée à se convertir : (…) Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment. (…). Le psaume, quant à lui, invite à la pénitence : Pitié, Seigneur, car nous avons péché (Ps 50, 3-4, 5-6ab, 1). Il y a aussi le très bel appel de St Paul : « nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu… » (1ère Corinthiens 5, 20 – 6, 2). La fin de la liturgie des Cendres se termine par la prière universelle.

Les cendres utilisées lors du rite sont elles-mêmes un symbole : elles proviennent de l’incinération des rameaux bénis lors de la fête des Rameaux de l’année précédente. Juste après avoir prononcé l’homélie, le prêtre prononce sur elles une bénédiction, parfois en les aspergeant d’eau bénite. Elles représentent, comme le précise le père Sébastien Antoni, liturgiste, une fin mais aussi un renouveau, « la possibilité de repartir, à nouveau, à la suite du Christ ».

Marie Lebailly

Merci à M. le chanoine Patrick Willocq pour sa relecture.

Sources :

  • Site de l’Eglise Catholique en France – https://eglise.catholique.fr
  • Site de « Croire.com » – https://croire.la-croix.com/
  • Missel des Dimanches 2019, éditions du Cerf, Paris, 2019
  • BERNARD Marie-Christine, Au rythme des fêtes chrétiennes. Une année à méditer, éditions du Cerf, 2014
  • GODEFROY Aurélie, Le catholicisme : rites, fêtes et symboles, éd. Presses de la Renaissance, 2016
© Copyright - ASBL Evêché de Tournai