Blason et devise

 » Consacre-les dans la vérité «  (Jn 17,17)

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D’azur, au chevron d’or, chargé d’un chevron diminué de sable, accompagné en pointe d’une étoile d’or à six rais. L’azur symbolise la fidélité, la persévérance, mais aussi le bassin méditerranéen, le Proche-Orient, berceau des trois religions monothéistes. Le chevron, sous la forme adoptée pour le blason de Mgr Charles-Marie Himmer, a les couleurs du chapitre des chanoinesses de Mons, or et noir, ville où l’évêque a exercé la charge de doyen. Le chevron marque aussi le lien avec l’évêque qui a ordonné le futur évêque au ministère diaconal et au ministère presbytéral. L’étoile est l’astre qui guide les mages vers la vérité, le Fils de Dieu devenu chair. L’étoile fait aussi allusion à la devise de l’évêque :  » Consacre-les dans la vérité « . L’étoile marque enfin le lien avec l’évêque consécrateur principal de l’évêque de Tournai, le cardinal Godfried Danneels, qui avait une étoile dans son blason. La croix au-dessus du blason est inspirée de la croix copte, en souvenir des études de l’évêque au Caire. Le chapeau d’un évêque comporte normalement deux fois trois rangs de houppes vertes, mais la tradition du siège épiscopal de Tournai, qui remonte à plusieurs siècles, est d’y mettre deux fois quatre rangs, comme pour un archevêque. C’est la croix au-dessus du blason qui indique sans ambiguïté qu’il s’agit d’un évêque.

Explication de la devise

Il est de tradition que tout nouvel évêque choisisse une devise épiscopale. Il s’agit la plupart du temps d’une phrase biblique qui éclaire la personnalité du nouveau pasteur en même temps qu’elle révèle la manière dont il envisage son ministère épiscopal. « Consacre-les dans la vérité » (Jn 17,17), telle est la devise retenue par Monseigneur Harpigny. Il nous éclaire sur ce choix.

Parmi les multiples traits qui caractérisent les mentalités en Europe occidentale, nous relevons, d’un côté, le respect immense des potentialités de l’être humain et, d’un autre côté, l’insistance exacerbée sur le devoir qu’a l’être humain de faire son bonheur et de respecter toute forme du vivant ainsi que le cosmos.

Ces deux traits révèlent des avancées de la pensée humaine manifestées au cours des derniers siècles et, en même temps, ils expriment l’oubli, la mise à l’écart, le rejet de la foi en Dieu, du dessein de Dieu pour l’humanité et le cosmos. Nous sommes de plus en plus conscients du fait que beaucoup de nos contemporains, en Europe occidentale, pensent, font des projets, envisagent l’avenir du monde, en étant persuadés que Dieu « n’a rien à voir là-dedans » et nous constatons que quelques-uns veulent « effacer » toute trace de la foi en Dieu et « tourner en dérision » toute forme de monothéisme, toute manifestation publique du « culte ». A la rigueur, certains concéderaient bien que la foi puisse « subsister » dans la sphère privée de la conscience individuelle.

Comme Nietzsche l’avait déjà écrit à la fin du XIXème siècle, ce n’est pas parce que l’être humain déclare que Dieu est mort et que le monothéisme est effacé, que la volonté de croyance ou de vérité disparaît pour autant. Cette volonté est tout simplement investie ailleurs : un parti politique, la science, l’athéisme même. A certains moments, des doctrines athées ou idolâtriques triomphent dans des totalitarismes qui suppriment impitoyablement des « humains superflus », comme l’a si bien fait percevoir la philosophe Hannah Arendt.

Des richesses insoupçonnées pour trouver le bonheur

Cependant, ces deux traits de mentalité en Europe occidentale ne doivent pas faire peur à ceux qui écoutent la Parole de Dieu et cherchent à la mettre en pratique. Si, pendant des décennies, des penseurs catholiques ont, avec beaucoup de finesse, dégagé l’œuvre purificatrice des expressions de foi venant de synthèses philosophiques (les fameux maîtres du soupçon) ou de systèmes de pensée nettement moins bien élaborés, il en est qui, depuis quelques années, rappellent avec justesse que la Parole de Dieu, l’Evangile, la foi catholique, l’enseignement de l’Eglise, la tradition chrétienne « proposent à tous, y compris aux non-chrétiens et aux athées » des richesses insoupçonnées pour trouver le bonheur et, même, interroger avec vigueur les fondements supposés acquis des grands courants de pensée véhiculés par les médias, et mis régulièrement en avant dans les argumentaires pour modifier la législation « qui doit s’adapter aux problèmes nouveaux » de la société.

Annoncer l’Evangile

En cherchant, dans la prière, une devise pour l’épiscopat, j’ai, une fois de plus, été frappé par l’importance accordée par le concile oecuménique Vatican II à l’annonce de l’Evangile, dans l’exercice du ministère de l’évêque. Vis-à-vis des chrétiens, l’évêque a la charge d’exhorter à la persévérance. « Nous devons, écrit l’apôtre Paul, continuellement rendre grâce à Dieu pour vous, frères aimés du Seigneur, car Dieu vous a choisis dès le commencement, pour être sauvés par l’Esprit qui sanctifie et par la foi en la vérité. C’est à cela qu’il vous a appelés par notre Evangile, à posséder la gloire de notre Seigneur Jésus Christ » (2 Thessaloniciens 2, 13-14). Vis-à-vis des païens, l’évêque a la charge « d’annoncer (…) l’impénétrable richesse du Christ et de mettre en lumière comment Dieu réalise le mystère tenu caché depuis toujours en lui, le créateur de l’univers ; ainsi désormais les Autorités et Pouvoirs, dans les cieux, connaissent, grâce à l’Eglise, la sagesse multiple de Dieu, selon le projet éternel qu’il a exécuté en Jésus Christ notre Seigneur » (Ephésiens 3, 8-11).

Pour annoncer l’Evangile, je m’en remets à la prière de Jésus que l’Eglise murmure sans cesse, surtout au cours de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Au chapitre 17 de l’évangile de Jean, Jésus, la veille de sa mort, devant ses disciples, s’adresse à son Père. Il rappelle sa mission ; il prie pour ses disciples ; il les envoie en mission ; il prie pour ceux qui, grâce à la parole de ses disciples, croiront en lui, Jésus.

Consacrés dans la vérité

Dans cette longue prière, appelée « sacerdotale », Jésus demande à son Père de consacrer ses disciples dans la vérité (Jean 17, 17). Il fait cette demande avant de rappeler qu’ils sont envoyés dans le monde. Il refait la même demande au verset 19 : « Pour eux, je me consacre moi-même, afin qu’ils soient eux aussi consacrés dans la vérité ».

Après avoir relu cette prière, il m’apparaît que le ministère qui m’est confié par l’Eglise ne portera du fruit que s’il s’inscrit dans la prière de Jésus. Je sais que, comme évêque, je fais partie d’un « ordre » et que c’est, ensemble, en communion avec le successeur de Pierre, le Saint-Père, que nous annonçons l’Evangile. Je sais également que comme pasteur d’une portion de l’Eglise universelle, appelée Eglise particulière, Eglise locale ou diocèse, je participe avec les presbytres au sacerdoce ministériel. Avec les prêtres, en particulier, je m’unis à la prière du Ressuscité, afin que tous, ministres ordonnés et laïcs, engagés par le sacrement du mariage ou consacrés, exerçant des responsabilités dans la société ou éprouvés par la maladie, tous nous soyons consacrés dans la vérité.

Mgr G. HARPIGNY

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