Une histoire de cloches : le patrimoine campanaire de la cathédrale de Tournai
« Une cathédrale aux cinq clochers dont 4 sans cloches (400 cloches) ». Une expression bien connue des Tournaisiens… mais est-ce bien exact ? Que sait-on des cloches qui se cachent dans les tours de Notre-Dame ?
Des dix cloches qui rythmaient les offices de la Cathédrale à la fin du 19e siècle, seules trois ont survécu aux réquisitions des autorités allemandes en 1943. Situées dans la tour Marie, il s’agit de la cloche Marie-Gasparine, de la cloche Marie-Nicolas et de la cloche Marc.
Trois survivantes
La plus célèbre de ces trois cloches est Marie-Gasparine, mieux connue sous le nom de Marie-Pontoise. Installée au dernier étage de la tour Marie, il s’agit du bourdon de l’évêque, fondue en 1843 par les frères Drouot de Tournai aux frais de Mgr Labis. Elle pèse 9 100 kg et sonne le « Fa ». Dans un article paru en 2010 dans Le Bulletin Campanaire, le chanoine Jean Dumoulin indique : « Sonne la veille et le jour des offices pontificaux, pour les Te Deum (avant et après la cérémonie), la veille et le jour de la Grande Procession (avant et après, lors du retour des châsses), pour les visites royales et avec toutes les cloches aux très grandes circonstances ».
Pendant douze années, en raison des travaux de restauration, Marie-Gasparine est restée silencieuse. Ce n’est que lors des fêtes de Pâques 2016 qu’elle a enfin pu résonner à nouveau. Anecdote amusante : à Tournai, la légende raconte que c’est Marie-Pontoise qui, à Pâques, ramène de Rome les oeufs en chocolat et les dépose dans les jardins pour que les enfants les trouvent…
La cloche Marie-Nicolas, dite Magrite, n’a pas été fondue à l’origine pour la cathédrale. Elle provient de l’abbatiale de Saint-Nicolas-des-Près. Fondue par Barbieux en 1737, elle pèse 2 500 kg et sonne la note « Ré ». Elle est aujourd’hui devenue le bourdon du Chapitre. Installée à l’avant-dernier étage de la tour Marie, elle fait entendre sa « voix » pour les offices du dimanche et des solennités ainsi que pour l’installation de nouveaux chanoines ou encore au moment de la consécration, lors de la messe dominicale.
Après la destruction de l’église Saint-Pierre en 1821, la cloche Marc a ensuite rejoint l’avant-dernier étage de la tour Marie. Elle a été fondue à Tournai en 1617. Avec ses 250 kg, elle est la plus légère des cloches actuelles. Elle sonne le « Do » lors des offices ordinaires.
Deux nouvelles venues au 20e siècle
Dès la fin de la seconde guerre mondiale, lorsqu’il devint certain que les cloches réquisitionnées ne reviendraient plus, il fallut songer à les remplacer. Ainsi, nous raconte Jean Dumoulin, « au mois de mai 1947, le chanoine Alphonse Feyen, efficace et habile conservateur de la cathédrale, entreprend les démarches pour remplacer le bourdon du doyen du chapitre ».
Cette nouvelle cloche, appelée Marie-Étienne, a été commandée à la fonderie Michiels de Tournai. Installée à l’avant-dernier étage de la tour Marie, elle fait résonner le « La » de ses 4608 kg lors des « offices célébrés par le Doyen du Chapitre (avant et après) ainsi que lors de la consécration pendant la messe du Doyen ».
La plus récente des cloches fondues pour Notre-Dame de Tournai est la cloche Catherine. Ce petit bourdon de 2 010 kg sonne le « Do dièse » lors des offices des fêtes. Elle a été fondue à Leuven à la demande du chanoine Carlos Van der Fraenen par la fonderie Sergeys, en 1976. Son parrain était le chanoine Albert Milet, à l’époque doyen du chapitre cathédral.
Marie Lebailly
Glossaire :
Bourdon : grosse cloche à son grave (définition Le Robert)
Campanaire : adjectif relatif aux cloches (définition Le Robert)
Sources :
« Marie Pontoise sonnera à nouveau durant Pâques », site de NoTélé [en ligne], 25 mars 2016, bit.ly/3jISMzX (consultée le 30 mars 2021)
« Historique des cloches de la Cathédrale Notre-Dame », site de NoTélé [en ligne], 4 avril 2015, bit.ly/3xjk6g4
(consultée le 30 mars 2021)
Boussemart E., « Quel Avenir pour les Cloches de l’église de la Madeleine ? », in Le Courrier de l’Escaut du 17 juillet 2001, p. 16.
Desmons F., Les Cloches de Tournai, Notes d’Histoire et d’Archéologie, Anvers, 1905.
Dumoulin Jean et Pycke Jacques, Notice sur les Cloches de la Cathédrale de Tournai, Tournai, 1976.
Dumoulin Jean, « Les cloches de la cathédrale de Tournai. Hier, aujourd’hui, demain » in Le Bulletin Campanaire, n°63, Association Campanaire Wallonne, a.s.b.l., 2010/3, pp. 14-22
Joris Serge, « À la découverte des clochers et du patrimoine campanaire de la cathédrale de Tournai » in Le Bulletin Campanaire, n°65, Association Campanaire Wallonne, a.s.b.l., 2011/1, pp. 8-15
Michel R., « La Spoliation des Cloches » in Le Diocèse de Tournai sous l’occupation allemande, Tournai – Paris, 1946, p. 242-247.
Waterloos-Maison Nicolas, « Pâques sonne le retour des cloches » in Bulletin trimestriel de Pasquier-Grenier, Pasquier-Grenier ASBL, n°80, mars 2005, pp. 5-12