Enseignement fondamental: les directions «ont pris le temps»

Enseignement fondamental: les directions «ont pris le temps»

Pendant quelques heures, dans le cadre magnifique du parc d’Enghien et de ses anciennes écuries, plusieurs dizaines de directeurs et directrices d’école ont été invité.e.s à partager un temps de respiration et de réflexion, pour revenir aux sources de leur métier.

À quoi reconnaît-on un membre d’une équipe de direction d’école? C’est quelqu’un qui court tout le temps, qui trouve des solutions aux petits et grands problèmes du quotidien. Qui a dû acquérir –souvent sur le tas– une solide expertise dans des matières aussi variées que la comptabilité, les bâtiments, les procédures administratives, les ressources humaines. Qui veille au moral des troupes (enseignantes), tout en ne perdant jamais de vue le bien-être et l’épanouissement des élèves. Et il ou elle, dans tout ça? Qui en prend soin? Qui l’écoute et l’encourage?  

Ce 16 février 2024, l’équipe diocésaine de pastorale scolaire du fondamental a voulu offrir aux participant.e.s un moment de ressourcement, léger et convivial. Sous le regard bienveillant de son prédécesseur André Ronflette (rebaptisé «Pastoman retraité» pour l’occasion!), la nouvelle responsable Françoise Prévost a accueilli l’intervenant du jour, le Père Daniel Federspiel. Salésien de Don Bosco, mais aussi clown et magicien à ses heures, le Père Daniel est un pédagogue et un éducateur passionné, mettant toujours l’enfant au centre, sans pour autant en faire un enfant-roi.

En guise d’introduction à la journée et de temps d’intériorité, une chanson qui semble avoir été écrite pour les directeurs et directrices. Un petit bijou signé Grand Corps Malade, Ben Mazué, Gaël Faye: «On a pris le temps».

Une confiance qui guérit

«Un clown, ça ne sert à rien, mais c’est utile», lance celui qui est aussi supérieur provincial de sa congrégation pour la région de Belgique sud, France et Maroc. S’il passe une partie de son temps à donner des conférences dans le monde de l’éducation, c’est avec ses chaussures de pointure 58 et sa perruque que ce clown improbable se rend dans les classes, au milieu des enfants, pour sensibiliser et épauler les équipes éducatives. «Dans la vie, on est riche de ce qu’on partage»: Daniel Federspiel se présente aux enfants comme un clown ne sachant ni lire ni écrire, et qui a besoin de leur aide. Avec un enthousiasme naturel, les enfants puisent dans leur créativité, leurs forces mais aussi leurs fragilités pour apprendre quelques trucs et astuces à leur nouvel ami.

Pour l’assemblée, le Père Daniel navigue entre spiritualité et postures éducatives, s’appuyant longuement sur l’histoire de l’aveugle Bartimée. Comme Jésus, un éducateur laisse sa porte ouverte, est attentif aux marges (aux périphéries, dirait le pape François?), à ceux qui ne rentrent pas dans le moule. Il y a les jeunes «difficiles». Ou alors les jeunes «qui nous mettent en difficulté»? «Ce n’est pas tout à fait la même chose», note le conférencier, «c’est un autre regard». Et c’est parfois à ces élèves qui dérangent, aux attitudes socialement inacceptables, qu’il faut redonner confiance. «La confiance nous vient des autres, elle nous guérit. Et cela commence par les petits encouragements.»

Bartimée jette son manteau pour se ruer vers Jésus. «Dans la perspective biblique, le manteau ne sert pas juste à se couvrir mais il représente ce que l’on est. Les jeunes sont habillés d’une certaine façon pour nous faire comprendre qui ils sont. Mais c’est aussi une réputation, une étiquette, un handicap qui abaisse…»

Éduquer dans la joie

Alors, l’orateur revient à des notions fondamentales. Dans le système éducatif, il y a l’adulte et l’enfant. Le premier a un métier, il représente quelque chose, il «sait». L’enfant, lui, «ne sait pas encore», c’est le petit. Et pourtant, Daniel Federspiel en est convaincu, les enfants savent des choses. Et pour «éduquer dans la joie», thème retenu pour cette journée de respiration, il faut observer les enfants avec un regard positif, un regard de pasteur: «Plus on travaille le positif, plus ça ‘transpire’. Même si le point positif est minime, cela va permettre de construire. La source de la joie, c’est repérer ce qui est solide chez eux pour s’appuyer dessus. (…) Aimer ses élèves, c’est leur donner la parole, les laisser exprimer ce qu’ils sont, les sécuriser.»

Avant de partager un apéro dinatoire, directeurs et directrices ont prolongé la réflexion, les échanges et le ressourcement dans les allées du parc d’Enghien. L’occasion aussi pour eux de partager leur quotidien, avec les instits malades à remplacer, les démarches administratives à n’en plus finir, la charge mentale qui commence avant même que l’école n’ouvre ses portes chaque matin et qui bien souvent s’invite le soir et les week-ends à la maison. Alors une demi-journée de pause, ce n’est sans doute pas grand-chose. Mais qu’est-ce que ça fait du bien!

Agnès Michel

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