Homélie du cardinal G. Danneels

Homélie du cardinal G. Danneels

Frères et soeurs,

Voici que pour la centième fois dans son histoire, Dieu donne un nouveau pasteur à son Eglise qui est à Tournai.

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Dans son amour pour son peuple et sa grande miséricorde, Il renouvelle donc encore une fois son alliance avec vous. Car à travers toutes les médiations humaines, le regard de la foi découvre dans le choix d’un nouveau pasteur, la main de Dieu. C’est Dieu en effet, qui suscite les bergers dont son peuple a besoin. Dans quelques instants, ce sera donc pour la centième fois, que l’Eglise imposera les mains à un évêque de Tournai. Rendons grâce au Seigneur. Cent fois centenaire est son amour. Non, « rendons grâce au Seigneur, éternel est son amour » (ps 136)

L’Eglise à Tournai a un nouveau pasteur. Mais est-ce bien vrai de parler ainsi ? Car c’est toujours le même Berger qui guide son troupeau : le Christ et le Christ seul. Car Lui seul peut dire : « Je suis le bon pasteur » (Jn 10,1). Non dans ce seul sens qu’il soit le meilleur, le plus généreux, le plus soucieux de ses brebis, mais dans le sens qu’Il est le seul, l’unique, l’irremplaçable. Car il n’y a qu’un seul véritable évêque, un seul « gardien de nos âmes ». Il n’y a qu’un seul Pasteur qui est la Parole même, qui est le Prêtre et l’Offrande, qui est le Guide de toutes les Eglises. Ce cortège des évêques qui se succèdent à travers les âges, ce n’est que la succession des pauvres serviteurs du seul Pasteur. C’est au Christ donc que le Peuple de Dieu doit penser quand il regarde son évêque. Et c’est sur la figure du Christ- Pasteur encore que celui-ci doit fixer lui aussi son regard jour et nuit, dans un mouvement ininterrompu de kénose et de dépouillement de soi et de tout sentiment d’autosatisfaction.

Car la parole de l’évêque ne peut être que celle du Christ. Comme nous venons de l’entendre dans la lettre à Timothée « C’est Lui qui a détruit la mort et fait briller la vie et l’immortalité par l’Evangile où nous avons été établi héraut… » (2 Tm 1,10s). Et c’est son dépôt qu’il est tenu de garder jusqu’au jour où le Seigneur reviendra. Il faut donc qu’il s’attache corps et âme à Celui qui est la seule Parole, pour que sa bouche et ses lèvres deviennent les siennes et que les brebis en l’écoutant, puissent reconnaître la voix du Bon Pasteur. D’ailleurs, comment serait-il capable de faire en sorte que sa parole ne soit pas seulement véridique, mais qu’elle soit en plus si puissante et si chargée de l’énergie de l’Esprit, qu’elle soit à même de toucher et de convertir les coeurs ? Peut-être sera-t-il capable d’annoncer correctement l’évangile dans sa vérité, mais non de le prêcher avec puissance. A une époque où la voix de Dieu est rendue presque inaudible dans un monde plein d’autres bruits, seul la Parole rendue puissante par l’Esprit, peut renouveler le fruit de la prédication de Pierre le jour de la Pentecôte : « Le coeur bouleversé d’entendre ces paroles, ils demandèrent à Pierre et aux autres apôtres : Que devons-nous faire, frères ? » (Act 2,37). Ce n’est qu’en union avec le Christ et dans force de son Esprit, que tout évêque ou pasteur pourra tout au long de sa vie, selon le mot des l’épître à Timothée ‘Raviver le don qui est en eux, depuis l’imposition des mains’ et de dire avec l’Apôtre : « Ce n’est pas un esprit de peur que Dieu m’a donné, mais un esprit de force, d’amour et de maîtrise de soi » (2 Tm 1,7). Et d’ajouter : « Ce n’est pas moi qui parle, c’est le Christ qui parle en moi » (2 Cor 13,3).

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