Message de Noël 2023
La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée (Jean 1,5)
Célébrer la naissance de Jésus de Nazareth, c’est d’abord regarder une crèche où repose un nouveau-né à Bethléem, alors que Marie et Joseph vivent normalement à Nazareth. On apprend que sur le chemin de Bethléem pour se faire inscrire lors d’un recensement, Marie sur le point d’accoucher ne trouve pas de place à la salle commune. L’enfantement se fait dans un endroit où les bergers mettent leurs bêtes pour la nuit.
Jésus représente déjà quantité d’enfants qui viennent au monde loin de chez eux, en des endroits insolites, non prévus. Regardons les nouveau-nés sur les moyens de transport dérisoires en Méditerranée, ou encore au Sahara, ou encore dans la bande de Gaza, ou encore près du lac Kivu.
Jésus est le frère d’enfants, d’adolescents, de jeunes victimes d’abus de pouvoir, blessés par les abus sexuels, humiliés par les abus spirituels. L’émission Godvergeten, dont deux parties sur les quatre ont été diffusées à la RTBF le 29 novembre dernier, suscite beaucoup d’émotions, à juste titre. Demandons à Jésus, lui qui est la lumière née de la lumière comme l’écrit l’évangéliste saint Jean, de nous donner la force de faire la lumière sur ce qui s’est passé. Ce n’est qu’en faisant la lumière que nous atteindrons la vérité, et que nous aurons les moyens d’agir pour rendre justice, accueillir la souffrance, la honte et, si possible, initier un chemin de réparation. Merci à la commission d’enquête au Parlement fédéral et à la commission spéciale au Parlement flamand de nous aider dans ce sens.
Jésus a été accueilli par des parents pleins d’affection pour lui. Récemment, nous avons appris que, durant quelques décennies, des filles-mères ont parfois été dirigées dans des institutions où elles pouvaient accoucher en toute discrétion, afin d’éviter le scandale ou encore parce qu’elles n’étaient pas capables d’élever leur enfant, en raison de leur situation sociale, économique. À l’époque, l’avortement n’était pas autorisé par la législation. Ce qui étonne nos mentalités, c’est le fait que l’enfant qui venait de naître était «enlevé» à sa mère et confié à un couple. Plusieurs de ces enfants n’ont jamais retrouvé leur mère biologique. Celle-ci a dû passer par des moments terribles, avec des blessures inguérissables. Ici encore, une enquête sera sans doute menée pour faire la vérité et ainsi, peut-être, trouver un chemin nouveau pour que ces enfants adoptés puissent au moins connaître le nom de leur mère de sang. Le Parlement flamand avait programmé cette enquête en 2015. Espérons que, cette fois-ci, elle puisse aboutir.
La foi chrétienne reconnaît en Jésus le Fils de Dieu, et même le Sauveur. Nous sommes ébahis. Dieu se manifeste en un nouveau-né. Il vient dans les ténèbres comme une grande lumière. Sa naissance est annoncée par un ange, comme le sera l’annonce de la résurrection près d’un tombeau au matin de Pâques.
La vie de Jésus, lorsqu’il sera adulte, ouvrira un chemin marqué par l’annonce d’une Bonne Nouvelle. Pas seulement un enseignement ou des discours, mais aussi des signes, des miracles, et encore un appel à le suivre. Jésus ouvre un monde nouveau. Ressuscité, Jésus ne peut plus être atteint par la mort; celle-ci n’a plus aucun pouvoir sur lui. Ressuscité, Jésus arrache le mal, pardonne les péchés, donne la vie qui ne finit pas, une vie de bonheur en un lieu où toute l’humanité est réconciliée avec Dieu; un lieu où tous nous nous reconnaissons comme frères et sœurs.
En croyant au Christ Sauveur, nous pouvons lui demander de se manifester comme Prince de la Paix là où de conflits violents font tant de dégâts. Nous pouvons aussi lui demander de rendre le droit et la justice.
Devant ce nouveau-né, Marie méditait dans son cœur son itinéraire depuis l’annonce faite à Nazareth, la venue des bergers venus reconnaître celui dont l’ange avait parlé, l’adoration des mages venus d’Orient avec leurs présents.
Regardons la crèche et, avec Marie, méditons ce que le Seigneur nous donne de «voir», de «contempler». N’hésitons pas à en témoigner.
Belles fêtes de la Nativité !
+ Guy Harpigny,
Evêque de Tournai